LES LESIONS MUSCULAIRES INTRINSEQUES
Lésions spontanées, sans contusion
La classification initiale des lésions est un élément déterminant dans la prise en charge thérapeutique. Nous mettrons de côté les anciennes dénominations, uniquement par la presse sportive, type élongation, claquage, déchirure).
Stade 0
Atteinte réversible de fibres musculaires. Douleur modérée. Contracture musculaire et diminution de la force. La récupération est complète en quelques heures.
Stade 1
Atteinte irréversible de quelques fibres musculaires et l’intégrité du tissu conjonctif de soutien (TC).
Les symptômes sont les mêmes qu’au stade 0 en plus marqués. La récupération est complète en 7à 14 jours.
Stade 2
Atteinte irréversible de quelques fibres musculaires et modérée du TC, le tout sans hématome.
Douleur avec retentissement fonctionnel variable selon la localisation. La récupération nécessite un délai de 14 à 21 jours en moyenne (nécessaire limitation des sollicitations des groupes musculaires concernés).
Stade 3
Atteinte de nombreuses fibres musculaires et du TC qui se trouve désorganisé. Il existe un hématome intra musculaire localisé. Les symptômes sont une douleur aigue, imposant un arrêt sportif, et l’impotence fonctionnelle marquée.
La récupération est de l’ordre de 4 à 6 semaines le plus souvent mais parfois au delà selon l’importance, le type et la localisation de la lésion. Cette évolution sera conditionnée par la qualité de la rééducation fonctionnelle proposée.
Stade 4
Rupture partielle ou totale du muscle, atteinte massive du TC et formation d’un hématome en général volumineux et diffus.
Les symptômes sont marqués (impotence fonctionnelle totale). Il y a rétraction musculaire puis formation d’une cicatrice fibreuse. Il existe en général un déficit de force résiduel, même s’il existe des phénomènes de compensation par d’autres muscles avoisinants.
La reprise des activités sportives est en général assez longue, de l’ordre de 3 à 6 mois.
LES LESIONS MUSCULAIRES EXTRINSEQUES
Lésions traumatiques par contusion (« béquilles »)
On peut retrouver des lésions se rapprochant des lésions intrinsèques mais l’élément déterminant dans la prise en charge est de connaître la présence ou pas d’un hématome au sein du muscle (ou en péri-aponévrotique).
LES LESIONS MUSCULAIRES CHRONIQUES
L’évolution d’un accident initial peut être difficile, avec apparition de complications qui entrainent une symptomatologie chronique type douleur ou gêne fonctionnelle. On peut retrouver ainsi par exemple une cicatrice fibreuse douloureuse gênante, une myosite ossifiante, un hématome résiduel. Autant de situations qui demandent une prise en charge spécifique.
Mais ne perdons pas de vue que notre objectif sera d’agir en amont en limitant le risque d’évolution péjorative. D’ou la nécessité de bien codifier les lésions et de suivre un protocole de rééducation rationnel et personnalisé.
LE MODE D’APPARITION DES LESION MUSCULAIRES INTRINSEQUES = SOUVENT UN GESTE EXCENTRIQUE
Il s’agit d’une contraction musculaire visant à freiner un mouvement (vers la position d’étirement), parfois dans un contexte d’échauffement insuffisant mais souvent sur un muscle en situation de « fragilité » par insuffisance de préparation (manque de force excentrique), par fatigue musculaire.
Les DOMS : douleur musculaire d’apparition retardée (24h après) suite à des efforts répétitifs, souvent inhabituels ou excessifs. Les efforts concernés sont des exercices musculaires excentriques (freinateurs). La durée décrite est souvent de l’ordre de 5 à 6 jours.
Ceci peut être aisément imagé par les courbatures du lendemain d’une randonnée en montagne au niveau des quadriceps, liées aux efforts freinateurs de la descente finale (ou en ski alpin avec les enchainements de bosses qui nécessitent ce même type de contractions).
Ce sont les micro-lésions musculaires consécutives au travail excentrique qui sont responsables de cette réaction inflammatoire des muscles concernés.
On constate alors 2 phénomènes, la douleur musculaire et la diminution de la force développée. La douleur a l’avantage d’être un signe d’alerte mais même lorsqu’elle disparaît, il persiste toujours un déficit de cette force musculaire avec une proprioception altérée (période de fragilité).
Le diagnostic est essentiellement clinique avec une douleur palpatoire diffuse, un étirement difficile et une contraction plus ou moins douloureuse et déficitaire, notamment en course externe, ceci dans les différents modes de contraction. Le diagnostic est déjà réalise a 90% à l’interrogatoire, avec la notion d’effort inhabituel en excentrique (mais pas toujours seulement excentrique).
Les examens complémentaires ne sont en général pas réalises dans les cas typiques sauf si le sportif présente de nombreux antécédents musculaires rendant nécessaire la réalisation d’un diagnostic différentiel. Si ceux-ci étaient réalisés, nous pourrions noter une élévation des enzymes musculaires, un œdème musculaire plus ou moins marqué en échographie et en IRM. (Photo IRM hypersignal du droit fémoral chez un footballeur)
La guérison est spontanée et ne nécessite aucun traitement particulier. Une chose à retenir: le testing musculaire doit être normal (étirement et contractions indolores) avant la reprise et celle-ci devra être dosée (progressivité indispensable).
La prévention: il faut traiter le mal par le mal en habituant le muscle à subir des contraintes excentriques, donc le travail excentrique est nécessaire en amont de la blessure.
Une évaluation isocinétique avec mesure de la force excentrique peut être réalisée en début de saison de sport afin de guider un éventuel renforcement a titre préventif. Cette évaluation permettra de calculer les rapports entre les muscles agonistes et antagonistes.
LA PRISE EN CHARGE MEDICALE DES ACCIDENTS MUSCULAIRES
Sur le terrain : il n’y a pas d’urgence. Face à l’apparition d’une douleur aigüe, une seule chose à faire, arrêter les sollicitations (mise en décharge éventuellement), comprimer (bande de contention pour les 48 premières heures) et glacer régulièrement. Important = ne pas masser.
Les éventuelles imageries ne seront pas réalisées avant 48 à 72 heures.
Une ponction sera parfois proposée, sous guidage échographique en cas d’hématome important (suivi d’une compression immédiate). Une injection de PRP (facteurs de croissance) est réalisée dans des circonstances particulières (récidives, lésions importantes, sportif de haut-niveau).
La rééducation fonctionnelle, élément déterminant.
Première phase: (période aigüe douloureuse)
Physiothérapie (cryothérapie, courants excito-moteurs, capillarisation, T-care thérapie), drainage à distance du foyer initial. Cryo-pressothérapie (type game ready) si disponible.
Repérer les zones non douloureuses et réaliser un travail isométrique indolore sur ces groupes musculaires avec respect de la règle de la « non douleur ».
Etirements manuels passifs, puis actifs progressifs infra-douloureux.
Deuxième phase: (amélioration des critères cliniques: palpation, étirement, contraction isométrique) Après échauffement, renforcement musculaire excentrique progressif manuel dans les secteurs angulaires de sécurité (sur 30 à 40° initialement sans aller en course externe), sans douleur. Débuter à vitesse lente. Ne pas négliger les muscles antagonistes.
Progressivité dans les exercices (exercices de co-contractions, proprioception…) qui devront être variés.
Puis renforcement excentrique avec l’aide du dynamomètre isocinétique si disponible.
Pour les ischio-jambiers et les adducteurs, le vélo peut être débuté très rapidement, initialement à vide. Objectif, faire travailler tout ce qui peut l’être.
Troisième phase: (finaliser la consolidation, préparer le retour terrain)
Massage, ultra-sons sur les zones cicatricielles éventuelles. Réhabilitation et travail sur le geste technique. Apprentissage du travail de prévention (étirements, Pb de technopathie éventuelle…)
LE RETURN TO PLAY
La réhabilitation du sportif blessé demande une bonne connaissance clinique mais également du sport pratiqué.
Il sera nécessaire de réaliser en salle les exercices qui seront effectués sur le terrain grandeur nature.
Ainsi, nous nous assurerons que tous les feus sont au vert avant d’envisager un retour à l’entrainement sans limite.
Exemple de critères utilisés :
- Respect du délai de repos usuel (sert de repère sans être un feu vert isolément)
- Normalisation des données de l’examen clinique (absence de douleur palpation, contraction et étirement)
- Retour terrain subjectif satisfaisant de la part de l’athlète (bonnes sensations du sportif)
- Evaluation musculaire +- tests proprioceptifs satisfaisants
- Récupération des amplitudes / souplesse optimale
- Amélioration lésionnelle en imagerie (contrôle non systématique)